Gestion du cash : anticiper ses besoins financiers en période de crises

En période d'instabilité, de crise ou de sous-performance, une gestion proactive de la trésorerie, basée sur des indicateurs comme les stocks ou la marge opérationnelle, est essentielle pour anticiper les tensions financières et éviter les crises de liquidité.
Hausse des coûts de financement, inflation persistante, et surtout allongement des délais de paiement fragilisent durablement le tissu économique. Dans ce contexte, la discipline de trésorerie devient un impératif stratégique. « Dans bien des cas, la vigilance ne s'installe qu'une fois la tension déjà perceptible sur les comptes bancaires. Des signaux d'alerte sont pourtant souvent visibles bien avant la crise », constate Julien Sortais, managing director du service Special Situations du cabinet Interpath France.
Plusieurs indicateurs opérationnels, à nouveau l'allongement des délais de paiement mais aussi la hausse du niveau de stocks permettent de repérer en amont les dérives susceptibles d'assécher la trésorerie. La baisse de la marge opérationnelle annonce, elle aussi, un risque de tarissement du cash à moyen terme.
« Ces indicateurs doivent être suivis en lien étroit avec le contrôle de gestion pour relier performance opérationnelle et flux de trésorerie. Trop souvent, la prévision de trésorerie n'est activée qu'en situation de crise, alors qu'elle devrait être un réflexe permanent », ajoute Julien Sortais. Bâtir une prévision de trésorerie à treize semaines permet un pilotage réactif, semaine après semaine, et une anticipation fine des besoins de liquidité.
Une « culture cash » pour tous
« Cette prévision permet d'identifier l'importance du problème. Les actions seront différentes selon qu'on fait face à une tension passagère ou à une impasse de trésorerie. En cas de tension, le trésorier peut aider le directeur financier à arbitrer les paiements stratégiques qui conditionnent la continuité d'exploitation », conseille Stéphane Nénez, directeur général délégué du cabinet Eight Advisory, notamment chargé de l'activité Cash Services.
Dans une entreprise en tension, le cash devient, par ailleurs, l'affaire de tous. Une culture cash doit irriguer l'ensemble du Comex et des directions opérationnelles. Les équipes commerciales doivent veiller au recouvrement et à la qualité du portefeuille clients. Les achats peuvent éviter les commandes non prioritaires. La direction financière doit, quant à elle, assurer la cohérence globale entre la performance d'exploitation, la marge et les besoins de financement.
Trop souvent, la prévision de trésorerie n'est activée qu'en situation de crise, alors qu'elle devrait être un réflexe permanent.
Julien Sortais, Managing director « Special Situations » du cabinet Interpath France
Lorsque la tension de trésorerie devient critique, une entreprise peut solliciter des délais de paiement auprès de l'administration fiscale via la commission des chefs de services financiers (CCSF). « Il est également recommandé de discuter directement avec ses fournisseurs pour convenir de moratoires temporaires. Ces démarches, si elles sont anticipées et transparentes, permettent de rassurer l'écosystème et d'éviter l'état de cessation des paiements », assure Julien Sortais.
En cas de difficultés prévisibles, mais non encore irrémédiables, les procédures préventives comme le mandat ad hoc ou la conciliation offrent un cadre sécurisé. Elles permettent de réunir autour de la table les principaux créanciers (banques, Etat, fournisseurs) et d'obtenir un gel immédiat des dettes, des moratoires ou des étalements de dettes sur 12 à 24 mois.
Par Mallaury Lalanne (Les Echos). Publié le 20 novembre 2025

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