L'Etat met les bouchées doubles pour les start-up de la santé
La French Tech Grand Paris lance la nouvelle édition de son programme dédié à l'e-santé. L'initiative reflète l'ambition de l'Etat par rapport aux jeunes pousses du secteur, celles-ci faisant notamment face à de nombreux freins.
Pour la troisième année consécutive, la French Tech Grand Paris et le Digital Medical Hub (spin-off de l'AP-HP) ont sélectionné 24 start-up pour leur programme e-santé baptisé Health Innovation Intensive Training (HIIT).
Pendant cinq jours, en mai 2025, ces pépites vont être accompagnées gratuitement par des entrepreneurs, médecins et experts business. Preuve du succès de ce bootcamp, le nombre de candidats a augmenté de 23 %, passant de 65 en 2024 à 80 en 2025.
Parmi les ex-lauréats, plusieurs ont depuis fait parler d'eux, à l'instar de DrugOptimal (optimisation pour la prescription de médicaments à destination des infirmiers) qui a récemment levé 3 millions d'euros ou encore d'Aalia.tech (qui traduit et contextualise les consultations en plus de 100 langues) lauréat du GenAI Studio de Microsoft.
De manière générale, de plus en plus de start-up se développent dans la biotech, la medtech et la santé numérique en France. Ces dernières représentent 40 % des 2.500 start-up deeptech françaises, selon les estimations de la mission French Tech. « On les retrouve également parmi les leaders, dans nos programmes French Tech Next40/120 et French Tech 2030 », se réjouit sa directrice Julie Huguet.
Si on compte les start-up santé de ses deux programmes et qu'on y ajoute « Health20 », il y a une quarantaine de jeunes pousses reconnues pour leur plus-value dans la santé.
Soutien de Bpifrance
« Notre rôle est d'assurer que ces entreprises, comme toutes les start-up françaises, trouvent en France un environnement idéal pour se développer et puissent ensuite proposer leurs solutions au plus grand nombre », souligne Julie Huguet. Le Réseau des acheteurs hospitaliers (Resah) est ainsi devenu partenaire du mouvement « Je choisis la French Tech », en faveur de l'achat labellisé « French Tech ».
Sur ces sujets, la mission French Tech n'est pas seule. Elle travaille « main dans la main » avec l'Agence de l'innovation en santé, PariSanté Campus (un hub impulsé par l'Etat à la croisée entre la recherche et la création d'entreprises) ou encore le Guichet national de l'innovation et des usages en e-santé (sous le sigle « G_Nius » lancé en 2020) pensé pour « faciliter la vie des innovateurs en santé ».
Sur le volet financier, il y a évidemment Bpifrance. Sur l'ensemble des fonds gérés par la banque d'Etat, trois sont totalement dédiés à la santé : celui baptisé « patient autonome », un autre dit « medtech » et enfin un consacré aux biotechs. De plus, dans son fonds Large Venture, de gros tickets ont été octroyés à Aqemia (découverte de candidats médicaments) ou encore Bioptimus (ChatGPT de la biologie).
Dans son rapport d'activité 2024, Bpifrance identifie d'ailleurs la santé comme le premier des « cinq secteurs stratégiques », avant la défense et la cybersécurité. Au total, d'ici à 2029, la banque d'investissement prévoit d'y injecter 10 milliards d'euros (contre 400.000 euros pour la défense sur la même période).
Alors y a-t-il un momentum santé dans l'écosystème français ? « On est à un moment de maturité », répond Chahra Louafi, directrice du fonds « patient autonome ». La crise du Covid a mis en avant les solutions de santé numérique, selon elle, impliquant beaucoup plus les patients, et embarquant les médecins jusqu'alors peu technophiles.
Trois grands enjeux
Mais la conjoncture d'incertitudes actuelle reste aussi complexe pour les jeunes pousses de l'e-santé que pour les autres. Sur la quarantaine de start-up du Health20 combiné au listing French Tech 2030, plusieurs sont en procédure collectives (Abys Medical, Epilab, Cardiawave, Poietis et Nosopharm).
Chahra Laoufi identifie trois grands enjeux à court terme : la capacité des entrepreneurs à s'adapter à un monde qui bouge très vite, notamment sur le volet technologique (évitant l'obsolescence), celle de comprendre que la valorisation - même en santé - se fait désormais non plus que sur le produit mais aussi sur le nombre d'utilisateurs, et enfin la formation des soignants pour ne laisser personne sur le carreau. Sans quoi toutes ces technologies resteraient inutilisées.
Par Marion Simon-Rainaud. Publié le 27 mars