Guide complet : ouvrir une friperie et réussir dans la seconde main
Une friperie est un commerce de détail, physique ou en ligne, qui vend des vêtements d’occasion. Le modèle économique est très en vogue dans l’actuel contexte socio-économique, où les arguments d’économies et d’écologie portés par la seconde main sont efficaces pour vendre. Pour preuve : en 2024, la plateforme de vêtements d’occasion Vinted est le site le plus populaire en France dans le secteur de la mode et de l’habillement (1). Vous souhaitez vous lancer avec succès ? Découvrez étape par étape comment construire votre projet, ouvrir votre friperie et développer votre notoriété.
#1 Étudier le marché de la seconde main pour affiner son projet
L’étude de marché est une étape préalable à toute création ou reprise d’entreprise, et déterminante de la réussite du projet. L’objectif consiste à définir la cible de clientèle d’une friperie pour affiner ses caractéristiques. En fonction du profil client, vous déterminez :
- Quels types de vêtements d’occasion vendre ? La clientèle d’une friperie veut potentiellement pouvoir acheter des vêtements de marque pas chers, des vêtements pour enfants en bon état, des vêtements et accessoires vintage…
- À quel prix ? Les friperies attirent des consommateurs qui souhaitent acheter à bas prix. Mais l’écologie est également un motif d’achat de vêtements de seconde main, auquel cas le prix est un critère secondaire. La tendance mode est aussi un déclencheur d’achat : des friperies telles que Âge Paris et Resap Paris vendent avec succès des vêtements upcyclés au prix fort. L’étude de marché vous aide à préciser le niveau de revenus et les moteurs d’achat de vos futurs clients, pour fixer des prix en adéquation.
- Où ? Friperie en ligne et/ou en magasin, ou friperie ambulante : étudier les habitudes d’achat des consommateurs de vêtements de seconde main permet de déterminer vos méthodes de vente.
- Comment communiquer sur l’ouverture de votre friperie ? Marketing digital ou traditionnel : il faut communiquer sur les bons supports pour rencontrer sa cible. Les arguments marketing, en outre, sont plus ou moins efficaces d’une clientèle à une autre. Autre possibilité : organiser l’inauguration de sa boutique physique en invitant un maximum de clients du même quartier et leurs réseaux respectifs.
Chiffres et tendances de la mode vintage à connaître pour ouvrir une friperie en 2024
Voici des chiffres récents pour comprendre les tendances et alimenter votre étude de marché.
Le marché de la seconde main est en pleine expansion
- À l’échelle mondiale, le marché de la seconde main génère des recettes estimées à 110 milliards de dollars (+ 22 % par rapport à 2020). Les prévisions les portent à 350 milliards de dollars à l’horizon 2027 (2). Le secteur de la mode d’occasion capte environ 30 % des recettes.
Dans la lignée de la vente en vrac dans le secteur de l’alimentation, la vente de vêtements d’occasion est tendance. La croissance du secteur s’explique par le désir des consommateurs d’acheter plus responsable et de réaliser des économies. Vous êtes sur un marché porteur. C’est un avantage : vous captez facilement des clients. C’est également une difficulté, car la concurrence est accrue : vous devrez vous démarquer.
L’enjeu écologique est une motivation d’achat forte.
- 44 % des consommateurs achètent de la seconde main pour donner une seconde vie aux vêtements, faire un geste écologique et éviter le gaspillage. Les vêtements pour enfants font partie des produits d’occasion les plus recherchés à cet effet (3). Acheter un vêtement d’occasion réduit l’empreinte carbone de 82 %.
Ces données et tendances 2024 sont intéressantes à deux égards pour l’ouverture de votre friperie :
- Vous savez qu’il y a un marché très dynamique sur les vêtements pour enfants d’occasion. Vous pourriez spécialiser votre friperie dans les vêtements pour enfants, ou axer votre communication sur ce volet.
- Votre stratégie marketing peut s’articuler autour des sujets d’économie circulaire, de slow fashion et de mode durable.
« La fripe, c’est chic » écrit l’Ademe (4). Dans votre communication, n’hésitez pas à reprendre les chiffres relatifs à l’impact environnemental de la production de vêtements neufs : « produire un jean équivaut à prendre 285 douches » (4), par exemple, est une donnée qui marque les esprits.
La génération Y est particulièrement encline à acheter d’occasion.
- Les consommateurs de la génération Y (nés entre 1980 et 2000) sont deux fois plus intéressés par les produits de seconde main (5).
Communiquer et vendre à destination d’un public « jeune » déjà convaincu est une stratégie économique : les efforts à déployer sont moindres. Convaincre les baby-boomers nécessite des efforts et du temps, mais capter cette cible de clientèle permettrait de vous démarquer. À vous de déterminer votre modèle. De même, la clientèle parisienne et des grandes agglomérations est plus encline à favoriser ce mode de consommation de l‘occasion. En ruralité, les entrepôts comme Emmaüs sont moins attractifs auprès des jeunes habitués aux zones commerciales.
La Gen Z plébiscite les sites de seconde main.
- Les consommateur dits Gen Z (les 12-25 ans) sont 63% a acheté davantage de produits en promotion de par l’inflation (6).
La génération née après les années 2000, la Gen Z, a bien compris que la seconde main répondait à plusieurs de ses critères de consommation. Petits prix, écoresponsabilité, m-commerce… deux jeunes sur trois ont acheté un produit de seconde main en 2022. Adeptes des plateformes de revente d’articles d’occasion, ces « digital natives » privilégient les achats en paiement fractionnés « Buy Now, Pay Later » (BNPL) réalisés en quelques secondes sur leurs téléphones mobiles et la livraison adaptable. Une génération ultra connectée qui trouve dans les achats de seconde main une réponse à leurs budget réduit et engagement écologique.
L’occasion soulève encore des freins à l’achat.
- 77 % des consommateurs craignent acheter d’occasion, faute de garanties (5).
Le marché de l’occasion est porté en grande partie par des places de marché telles que Leboncoin et Vinted, où la majorité des transactions se font de particulier à particulier. En ouvrant une friperie, vous proposez de vendre des vêtements d’occasion de professionnel à particulier : vos clients bénéficient de garanties légales (garantie de conformité (6) et droit de rétractation en ligne (7)). Communiquer sur vos garanties est efficace pour lever un frein à l’achat.
#2 Faire un business plan pour financer l’ouverture de sa friperie
Le business plan est un support précieux pour l’entrepreneur, qui s’y réfère régulièrement au moment de créer son entreprise et de la développer. Le business plan reprend l’étude de marché et décrit les caractéristiques du projet de friperie. Le document inclut en outre un prévisionnel financier : la liste des dépenses et de recettes prévisionnelles. Faire un business plan vous permet de :
- Connaître le montant nécessaire à l’ouverture de votre friperie.
- Évaluer vos recettes, pour vérifier la rentabilité de votre friperie et pour avoir de la visibilité sur vos perspectives de rémunération.
- Présenter un projet solide aux investisseurs et aux banques, pour financer votre projet.
La réalisation d’un prévisionnel financier n’est pas une tâche aisée. Oublier des dépenses d’investissement ou des charges liées aux recettes, notamment, constitue un risque non négligeable. Vous pouvez vous rapprocher d’un expert-comptable pour obtenir un prévisionnel plus fiable.
Comment financer l’ouverture de sa friperie ?
En 2021, la plateforme de ventes de vêtements d’occasion de luxe Vestiaire Collective levait 178 millions d’euros (8). En 2024, l’entreprise mise sur le financement participatif pour se financer à hauteur d’au moins 1 million d’euros (9). Vous n’en êtes pas encore là, mais cet exemple de réussite illustre vos possibilités de financement à court et moyen terme.
Pour ouvrir votre friperie, envisagez diverses sources de financement en complément de votre apport personnel.
- Le prêt bancaire : cette solution de financement est la plus répandue chez les créateurs d’entreprise. Faire appel à une banque pour financer votre friperie est un bon moyen de vérifier la rentabilité du projet. Votre conseiller étudie en effet votre business plan avec soin, et décide de vous financer sur cette base, car il croit en votre réussite. Notez en outre que la banque peut vous accompagner sur certains volets réglementaires, en vous mettant en relation avec des prestataires d’assurances professionnelles et des experts du droit, par exemple.
- Le love money et le financement participatif : vos proches et des tiers investissent, avec ou sans contrepartie. Cette source de financement peut compléter utilement un prêt professionnel.
#3 Réaliser les formalités juridiques et administratives pour démarrer
Création d’entreprise
Vous pouvez ouvrir une friperie en tant qu’entrepreneur individuel, éventuellement en microentreprise. Cette option est intéressante pour simplifier votre gestion. Notez néanmoins que vous êtes limité dans votre développement : le statut d’auto-entrepreneur prend fin lorsque vous réalisez plus de 188 700 € de CAHT annuel (10). Vous pouvez créer une microentreprise si vous souhaitez tester votre idée de friperie avant de vous développer : le statut est notamment adapté en reconversion professionnelle et en cumul d’emploi salarié.
Alternativement, vous pouvez créer une société commerciale : SARL ou SAS. Si vous vous associez, ou si vous faites entrer des investisseurs, la société commerciale est votre seule option.
Le statut de micro-entrepreneur est avantageux sur le plan économique si vos frais professionnels sont faibles : si vous ouvrez par exemple une friperie en ligne, car vous économisez sur le loyer commercial. N’hésitez pas à vous rapprocher d’un expert-comptable pour simuler et comparer le poids des cotisations sociales en microentreprise et en société commerciale.
Inscription au registre des revendeurs et tenue d’un registre de police
En tant que revendeur de produits d’occasion, la loi vous impose deux obligations spécifiques :
- Inscrivez-vous sur le registre des revendeurs d’objets mobiliers (11).
- Prévoyez d’acheter et de tenir un registre des vendeurs (12)
Respect de la réglementation applicable aux commerçants et e-commerçants
Si vous ouvrez votre friperie dans une boutique physique, vous devez respecter les normes de sécurité et d’accessibilité propres aux ERP. A priori, votre bailleur est responsable des différentes mises aux normes : quand vous prenez votre local, vous êtes couvert.
Friperie en ligne ou en boutique, en tant que commerçant, vous êtes tenu de certaines obligations légales, notamment en matière d’information des consommateurs. Vous devez en outre offrir des garanties obligatoires : garantie des vices cachés, garantie de conformité. Des obligations supplémentaires s’appliquent si vous vendez des vêtements de seconde main en ligne : droit de rétractation notamment.
#4 Trouver un local ou créer le site web de sa friperie
Si vous décidez d’ouvrir votre friperie dans une boutique physique, deux points spécifiques doivent retenir votre attention :
- L’emplacement de la boutique. Vous ouvrez un commerce de proximité ? Découvrez notre infographie pour comprendre en un clin d’œil comment choisir l’emplacement de votre local commercial.
- Le contenu du bail commercial. N’hésitez pas à faire appel à un juriste ou à un avocat pour vous sécuriser.
Si vous ouvrez votre friperie exclusivement en ligne :
- Le référencement naturel (SEO) de votre site web a une importance équivalente à l’emplacement d’une boutique : les clients doivent pouvoir vous trouver facilement.
- Prévoyez en amont les modalités pratiques de livraison de vos produits aux clients. Dans un enjeu de cohérence, privilégiez les modes de transport les plus écologiques.
#5 Se procurer un stock de vêtements d’occasion
Le principe de la friperie est de vendre des vêtements d’occasion. Pour vous fournir, les réseaux de distribution traditionnels ne sont donc pas adaptés. Pour acheter votre stock de vêtements de seconde main, envisagez :
Les dépôts-ventes.
Les déstockages.
Les vide-greniers, les marchés et les brocantes.
Les boutiques associatives telles qu’Emmaüs.
Les plateformes de vente en ligne de vêtements d’occasion.
#6 Se différencier pour réussir sur le secteur de la seconde main
La friperie est un secteur d’activité florissant, la concurrence est rude. Les plateformes telles que Leboncoin et Vinted, en outre, risquent de vous faire de l’ombre. Pour réussir dans la seconde main, vous devez vous démarquer. Voici des suggestions à cet effet.
- Misez sur une communication d’ampleur. Le marketing est un poste budgétaire à ne pas négliger dans votre business plan. Certaines actions marketing, toutefois, sont gratuites : avoir une fiche d’établissement Google et des comptes actifs sur les réseaux sociaux, par exemple.
- Proposez une expérience client irréprochable. Des fonctionnalités d’intelligence artificielle – chatbots par exemple – permettent d’offrir une expérience utilisateur optimale sur le site web de votre friperie. La qualité de votre service client – traitement des réclamations notamment – est également déterminante.
- Innovez. Le concept à l’époque était novateur : la vente de vêtements d’occasion au kilo rencontrait le succès, au point que Kilo Shop est désormais une franchise de friperies. À votre tour d’imaginer un concept innovant : une friperie où les clients peuvent louer plutôt qu’acheter, une friperie qui remet les vêtements d’occasion en parfait état, etc.
Sources :
(1) https://www.similarweb.com/fr/top-websites/france/lifestyle/fashion-and-apparel/
(2) https://www.thredup.com/resale/
(3) https://enov.fr/wp-content/uploads/2021/11/Enov_Infographie-Novascope-seconde-main-2021.pdf
(4) https://librairie.ademe.fr/cadic/4367/lrdml_expo_affiche_a2_conception_version_def.pdf
(5) https://lehub.web.bpifrance.fr/actualites/10-chiffres-a-connaitre-sur-le-marche-de-la-seconde-main?pk_vid=f9458e8f3b4f38f41709195521691c0a
(6) https://www.influencia.net/la-gen-z-folle-du-e-commerce/
(7) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006069565/LEGISCTA000032221271
(8) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000032226844/
(9) https://fr.fashionnetwork.com/news/Apres-sa-derniere-levee-de-fonds-vestiaire-collective-valorisee-a-1-7-milliard-de-dollars,1336476.html#off-white
(10) https://www.tradingsat.com/actualites/informations-societes/le-specialiste-du-luxe-d-occasion-vestiaire-collective-envisage-une-entree-en-bourse-en-2025-1102285.html
(11) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000042159220/
(12) https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/R14001
(13) https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000041920604/2024-02-29/
Par Sarah de Gouyon Matignon (Les Echos Publishing)