07/12/2023
Article

Reprise d'entreprise : comment gérer la passation de pouvoir avec le cédant

Pour que la passation de pouvoir entre cédant et repreneur se passe bien, le premier doit lâcher prise et le second s'imposer. Il est conseillé d'encadrer cette période pour éviter que la situation ne s'envenime.

Cent jours de cohabitation. Nicolas Patris, dirigeant de la société Matisa, se souvient avec acuité de cette passation de pouvoir avec la cédante entre septembre et décembre 2021. « Le premier mois a été décisif pour en apprendre le plus possible sur le mode de fonctionnement de l'entreprise, découvrir l'historique et se faire accepter des salariés tout en s'adaptant aux habitudes de travail », raconte Nicolas Patris, à la tête de cette société spécialisée dans la découpe et l'assemblage de matières plastiques, située à Mérignac (Gironde).

Le repreneur a surtout profité de cette courte période pour faire connaissance avec les personnes clés de cette entreprise de 20 salariés. De futurs alliés rencontrés préalablement et individuellement au cours de l'été 2021. « Je ne connaissais ni le métier, ni le secteur d'activité. La cédante m'a rapidement mis en relation avec trois salariés clés qui m'ont présenté les clients et les fournisseurs et m'ont expliqué les process de fabrication. L'ancienne dirigeante était surtout là pour transmettre la partie administrative et comptable qu'elle gérait, et faire le lien entre les salariés et moi-même afin de les rassurer », explique le repreneur de 51 ans.

Prendre rapidement le pouvoir

Pour que ce passage de témoin se fasse dans de bonnes conditions, le cédant et le repreneur ont par ailleurs décidé de clarifier les rôles de chacun et de ne pas partager les décisions. Ce passage de témoin étant capital dans la prise en main de l'équipe et du fonctionnement interne, le cédant et le repreneur doivent cependant agir comme deux partenaires et établir un climat de confiance.

L'objectif étant pour le repreneur de marquer son territoire vis-à-vis des collaborateurs, mais aussi des clients et des fournisseurs. « Nous avons décidé de ne pas créer l'ambiguïté d'une direction bicéphale pour les salariés. La cédante pouvait intervenir dans les discussions mais j'avais le dernier mot. Cette période à deux reste compliquée car les équipes ne savent pas vers qui se tourner, vers l'ancien qui est déjà parti ou le nouveau, qui ne maîtrise pas encore toutes les subtilités du métier », confesse le repreneur.

LIRE AUSSI : Résidence principale d'un entrepreneur individuel : à lui de le prouver !

Pour organiser en douceur ce temps de passage de témoin entre un repreneur et un cédant, plusieurs options s'offrent aux dirigeants. Un accompagnement relativement souple en ayant recours à un contrat de prestations de services - le cédant se tenant à la disposition du repreneur pendant une période définie pour une prestation rémunérée ou non à l'heure ou au forfait - ou plutôt formel en signant un contrat de travail à durée déterminée, ou une convention de tutorat. Cette dernière permet d'encadrer les relations entre cédant et repreneur dans le cadre d'une reprise et peut être envisagée à titre gracieux.

« Il est préférable de donner un cadre à cet accompagnement. Cette passation peut être envisagée à temps plein les premiers temps puis en réduisant la présence du cédant les dernières semaines. Dans le cas où un salon professionnel se tient cinq mois après la signature de la cession, il est conseillé d'adapter le protocole et de demander au vendeur qu'il soit présent afin de présenter les prospects et de mieux transmettre le carnet d'adresses », préconise Martin Schnapper, expert-comptable au sein de Fidaquitaine.

Décider d'une rémunération

Outre la durée d'accompagnement, ce protocole peut préciser les conditions d'exercice du cédant (gratuit ou rémunéré), un cadre horaire s'il s'agit d'un contrat de travail, les missions à accomplir, les moyens proposés au vendeur comme la mise à disposition d'un véhicule ou le remboursement de frais. « Si le repreneur n'est pas issu du secteur d'activité de la société cible, il peut être opportun de rémunérer le cédant, par exemple autour de 2.000 euros par mois, pour que l'accompagnement soit de qualité », estime Guillaume David, cofondateur du cabinet Wire avocats.

LIRE AUSSI : D'association à SARL, un changement de statut complexe pour Koala and Co

Pour garantir le succès de la reprise et inciter le cédant à remplir correctement son rôle, il est aussi possible de prévoir un bonus. « Cette pratique reste toutefois peu courante. Si le repreneur remet au cédant un bonus de 100.000 euros en plus du prix de rachat de la société cible après avoir bénéficié d'un accompagnement de qualité, l'administration fiscale pourrait requalifier en rémunération cette somme. Le paiement de charges patronales et sociales incomberait ainsi aussi bien à l'entreprise reprise qu'au cédant », ajoute Guillaume David.

Par Mallory Lalanne - Les Echos entrepreneurs. Publié le 29 novembre 2023

Pour continuer votre lecture

Légère baisse des créations d'entreprises en 2023
#Entrepreneurs (1 à 10 salariés)
Article
1 051 500 entreprises ont été créées l'an dernier en France. Un chiffre en repli de 1 % par rapport à 2022.
L'emplacement, un choix déterminant pour le succès d'une activité commerciale
#Artisans commerçants
Article
Prix du loyer, flux piétons et routiers, accessibilité du site, clientèle visée… chaque paramètre doit être pris en compte lorsqu'on choisit un emplacement. Ainsi, l'hypercentre n'est pas toujours la meilleure équation coût-rentabilité.
Le contrat de partenariat : fonctionnement et avantages
#Entrepreneurs (1 à 10 salariés)
Article
Clause de confidentialité, répartition des coûts, contreparties financières… découvrez les éléments essentiels du contrat de partenariat, pour une collaboration réussie.