L'emplacement, un choix déterminant pour le succès d'une activité commerciale
Prix du loyer, flux piétons et routiers, accessibilité du site, clientèle visée… chaque paramètre doit être pris en compte lorsqu'on choisit un emplacement. Ainsi, l'hypercentre n'est pas toujours la meilleure équation coût-rentabilité.
Le succès d'un commerce ? « L'emplacement, l'emplacement, l'emplacement », entend-on souvent. Lorsqu'il a ouvert sa première supérette en 2022, Antoine Tétard, responsable de la stratégie du réseau de supérettes API a non pas visé une implantation en hypercentre, mais en zone rurale, dans le bourg de Claix en Charente, loin des supermarchés et des enseignes de grande distribution.
« Nous ciblons les communes de plus de 750 habitants, là où les services n'existent plus et qui sont situées à une demi-heure aller-retour d'un supermarché », explique Antoine Tétard. Un an après sa création, ce réseau de supérettes a déjà ouvert 22 commerces, essentiellement en Nouvelle-Aquitaine et en vise 36 sur l'ensemble du territoire d'ici la fin de l'année.
Analyser les flux piétons et routiers
Qu'on exerce dans la mode , dans l'alimentaire , dans la restauration ou les services, l'emplacement est sans doute l'une des décisions les plus importantes à prendre pour un dirigeant et un commerçant. La raison : le choix de la localisation ou de l'emplacement commercial a un effet direct sur les résultats de son activité.
Avant de se lancer, plusieurs paramètres doivent être évalués. Premier principe de base : s'assurer que l'environnement choisi correspond à sa clientèle. « Quand on veut ouvrir un restaurant à thème et qu'on vise essentiellement de jeunes étudiants, la ville doit bien entendu rassembler suffisamment de population cible », conseille Olivier Fouqueré, directeur fondateur d'Emprixia, un cabinet d'études pour le commerce, spécialisé dans l'analyse des territoires commerciaux.
Mener une étude de marché
Il est ainsi possible de mener son étude de marché , en récoltant des informations sur la population, son âge, sa catégorie socioprofessionnelle sur le site de l'Insee. Certaines communes mettent par ailleurs en accès libre leurs données.
Autre grand critère : le flux. Une boutique située sur un axe peu passant n'a que peu de chance d'être visitée. « Le flux routier est très important. Avant chaque ouverture, nous avons analysé la localisation et opté pour un emplacement implanté à des croisements de départementales afin de cibler les utilisateurs des villages environnants et pas uniquement les consommateurs qui résident à quelques encablures de la supérette », confie Antoine Tétard.
Un emplacement en coeur de ville ou dans des rues marchandes premium n'aura pas forcément le même coût qu'un commerce en seconde ligne. « Certains concepts, comme certaines offres de service, peuvent très bien vivre dans des rues moins exposées », explique Olivier Fouqueré.
Identifier la concurrence et étudier sa zone de chalandise
Avant d'installer son entreprise, il est par ailleurs essentiel de s'assurer qu'on n'arrive pas sur un marché déjà saturé et d'étudier sa zone de chalandise. Et pour un concept franchisé , l'expert recommande aussi « en plus d'analyser les flux piétons et routiers, de regarder l'implantation des autres magasins pour reproduire les mêmes critères d'implantation, afin de trouver le bon quartier et la rue adéquate. »
Pour évaluer le potentiel d'une activité commerciale, il faut étudier la distance que le consommateur est prêt à parcourir pour fréquenter le magasin et surtout le temps nécessaire pour se rendre sur place.
« La zone de chalandise est un point essentiel pour bien qualifier l'environnement d'un point de vente, et estimer la future performance du magasin, c'est-à-dire le chiffre d'affaires prévisionnel. Concernant un projet urbain, on va limiter la zone à un rayon permettant une fréquentation piétonne, autour par exemple de 700 mètres. Concernant une implantation dans une zone commerciale, le déplacement en voiture peut représenter plusieurs dizaines de minutes », explicite Olivier Fouqueré.
Certains cabinets réalisent des études, à hauteur de 1.000 à 3.000 euros HT. Ils font une analyse qualitative du site d'implantation prévue, en se basant sur les critères de visibilité, d'accessibilité, d'ambiance d'achat et de sécurité des aménagements (trottoirs suffisamment confortables et sécurisés, par exemple…).
5 à 10 % maximum du chiffre d'affaires pour un loyer commercial
Autre critère déterminant : le prix. Le coût au mètre carré par an est essentiel pour un commerce. Trop élevé, il peut mettre en péril la rentabilité de l'entreprise. « La plupart du temps, les franchiseurs demandent que la charge de loyer ne représente pas plus de 5 % ou 10 % du chiffre d'affaires selon l'activité de l'enseigne. Si le loyer est plus élevé, il est toutefois possible de négocier son coût. Tout dépend en réalité de la force de l'enseigne. Une franchise aura plus de poids et d'influence dans une discussion qu'une enseigne de faible notoriété », estime Olivier Fouqueré.
Se servir du géomarketing
Dans certains cas, si le concept le permet, mieux vaut choisir un local un peu moins spacieux mais bien visible que prendre le risque de payer beaucoup plus. Dans la recherche d'un local, le géomarketing, qui exploite et croise des données géographiques et sociodémographiques, peut fournir des informations extrêmement intéressantes.
« En s'appuyant sur des bases de données sociodémographiques de l'Insee et des bases de données entreprises (type base Sirene ) par exemple, il est ainsi possible de définir avec précision tous les emplacements potentiels qui répondent aux différents critères. Nous pouvons par ailleurs créer des modèles d'implantation, estimer un chiffre d'affaires potentiel, définir des scores en fonction de divers paramètres : nombre de clients, temps d'accès, concurrence ou encore données d'activité historiques », détaille Nicolas Cuartero, directeur des études au sein de la société Articque.
Une approche qui a été cruciale dans le développement du réseau API. « Cela nous a permis de prendre des décisions territoriales assez précises et pratiques, de voir sur une carte les zonages, les implantations de la grande distribution, les foyers de population mal identifiés et de les corréler à notre connaissance du terrain », explique Antoine Tétard.
Par Mallory Lalanne - Les Echos entrepreneurs. Publié le 6 décembre 2023