Immobilier : les nouvelles formules de bureaux
La généralisation du télétravail a transformé les modes d'organisation. Les entreprises adaptent leur immobilier aux nouveaux usages et optent de plus en plus pour le bureau opéré, confiant la gestion et l'animation de leur immeuble à un tiers.
Le télétravail transforme l'immobilier d'entreprise. Si la possibilité de travailler à distance est considérée comme un acquis pour les salariés, l'envie de retourner au bureau, en particulier chez les jeunes générations, s'exprime. Dans un contexte de guerre des talents, l'immobilier devient un enjeu d'attractivité.
« Les entreprises veulent que leurs espaces de travail soient une destination, un lieu de fierté et un marqueur identitaire », constate Sophie Henley-Price, associée senior chez Studios Architecture. L'agence vient de livrer le siège parisien de la licorne tech Ledger : un lieu immersif consacré à l'univers du web 3.0 et de la cryptomonnaie, doté d'une offre de services pléthorique, en plein coeur du Marais.
Au bien-être des collaborateurs s'ajoute une dimension expérientielle et communautaire.
Le bureau est plus que jamais associé à la performance des collaborateurs. La clé de la réussite d'une entreprise passe par le bon équilibre entre productivité, animations et services », affirme Matthieu Lalou, cofondateur de Spliit, agence immobilière pour start-up et PME.
Empruntant les codes de l'hôtellerie, les bureaux s'ouvrent vers l'extérieur. L'Atelier, le nouveau siège de Covivio, accueille ainsi des clients et entreprises externes pour des projets événementiels ou culturels.
« C'en est fini de la laideur et de l'austérité des bureaux. Il y a une envie collective que le lieu de travail soit aussi beau qu'à l'hôtel et pensé comme un espace de sociabilisation », assure Céline Leonardi, directrice commercialisation et design UX de Covivio.
La révolution du bureau opéré
Preuves de l'évolution des usages, de nouvelles offres fleurissent sur le marché du bureau opéré qui connaît, selon le baromètre Ubiqdata, une croissance significative de 46 % entre 2022 et 2023. « C'est la meilleure option pour faire revenir les gens au bureau », estime Stéphane Adnet, directeur général d'Insitu. Le groupe propose des surfaces de bureau « all inclusive », incluant tous les services (maintenance, jardinage, fiscalité, etc.), mais également l'aménagement et la personnalisation des espaces de travail.
« En plus d'alléger leur bilan comptable, les entreprises bénéficient d'une flexibilité contractuelle, avec des durées d'engagement qui évoluent en fonction de leurs besoins », précise le directeur. De la formule économique au « work palace » avec voiturier et prestations de luxe (Spa, fitness, manucure, salon de coiffure, cuisine à l'assiette d'un chef étoilé, etc.), le panel de solutions est large.
Le beau fait son entrée dans les bureaux
Le télétravail a remis le bureau au coeur des stratégies d'entreprise qui en font un facteur d'attractivité pour recruter ou garder les talents. Selon le baromètre annuel Paris Workplace IFOP-SFL, publié en novembre, qui a interrogé 1.300 salariés franciliens, 53 % des répondants estiment que le bureau est plus un « lieu de vie où l'on aime passer du temps ».
Depuis la crise sanitaire, la beauté des bureaux est devenue une composante du bien-être au travail : les salariés qui accordent une note esthétique très élevée à leurs bureaux (supérieure ou égale à 9 sur 10) attribuent également une note de bien-être largement supérieure (8,9 contre 7,1 en moyenne pour l'ensemble des salariés). Pour 87 %, le jugement est unanime : « il est important qu'une entreprise dépense de l'argent pour la décoration de ses bureaux ».
L'ambiance hôtellerie est plébiscitée par les collaborateurs, à 47 %, tout comme les quartiers du centre ouest de Paris et les façades haussmanniennes qui récoltent le plus de points sur l'échelle de la désirabilité et de l'esthétisme.
Ces pratiques sont rendues possibles par la digitalisation de l'immobilier tertiaire. La plateforme logicielle Z#bre, par exemple, mesure l'occupation réelle des bureaux et identifie les espaces sous-utilisés.
De son côté, le spécialiste multimétiers de l'immobilier professionnel Kardham a développé des briques logicielles, basées sur des cas d'usage récurrents, qui optimisent l'utilisation des bureaux, du parking au poste de travail.
« Le smart-building offre des outils de pilotage en temps réel pour gérer les flux et s'assurer de la bonne adéquation de la ressource et du besoin », explique Roman Coste, directeur général associé du groupe Kardham. Et de résumer : « Le tertiaire est en train de basculer d'une économie du volume à une économie valeur ». La qualité des espaces de travail l'emporte sur la quantité.
Par Eugénie Deloire - Les Echos Publishing. Publié le 10 décembre 2025