22/06/2022
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Femtech : la technologie pour la santé des femmes

Règles, contraception, cancer du sein, ménopause : le secteur de la Femtech se moque des tabous et révolutionne la santé des femmes grâce à l’innovation. Promis à un bel avenir, ce secteur qui s’adresse à la moitié de la population mondiale, s’est longtemps heurté à de solides verrous culturels et financiers. C’était sans compter la détermination de ces nouvelles créatrices d’entreprises qui ont pour ambition de révolutionner l’entrepreneuriat en France. 

Dans cet article, nous verrons : 

  •     ce qu’est la Femtech, 
  •     pourquoi la Femtech est un secteur porteur, 
  •     comment ce secteur se met au service de la santé des femmes

Qu’est-ce que la Femtech ?

Vous connaissez sûrement le terme Fintech, qui désigne les entreprises qui bouleversent les secteurs de la finance et de la banque. Mais êtes-vous familier avec l’appelation Femtech ? Depuis quelques années, les entreprises de ce secteur ambitionnent de révolutionner la santé des femmes grâce à la technologie. Vaste sujet puisqu’il couvre à la fois les problématiques de fertilité, de menstruation, d’allaitement et même de bien-être sexuel. On trouve ainsi des applications permettant de suivre sa fertilité, des pompes à lait silencieuses, ou des soutiens-gorge capables de détecter le cancer du sein. Ce jeune marché, qui a le vent en poupe, est porté par le renouveau des mouvements féministes aux États-Unis et en Europe, qui souhaitent briser les tabous autour de la santé des femmes, comme l’explique Marine Wetzel, qui dirige Imana.care, une plateforme qui aide les femmes à lutter contre les déséquilibres hormonaux : “L’émergence du terme Femtech, popularisé par la fondatrice de l’application de santé menstruelle Clue, coïncide avec le début de la médiatisation des mouvements de société comme #metoo. Avec la troisième vague du féminisme, les femmes cherchent à comprendre leur corps et à en reprendre le contrôle. Les innovations femtech s’inscrivent dans cette dynamique.”

Un secteur extrêmement dynamique 

Entre 2014 et 2017, le secteur de la Femtech a levé pas moins d’un milliard de dollars. Selon l’institut Frost & Sullivan, le marché de la Femtech pourrait même représenter 50 milliards de dollars d’ici 2025. Un chiffre en croissance permanente, porté par un marché potentiel de quatre milliards de clientes dans le monde. On sait par ailleurs que 66% des femmes consultent des informations médicales en ligne, et que 80% des dépenses en santé sont effectuées par des femmes. Difficile d’ignorer le potentiel explosif du marché de la Femtech. Certains l’ont bien compris et ont investi au bon moment sur des pépites du secteur. ObsEva, une entreprise pharmaceutique suisse spécialisée dans le traitement de pathologies gynécologiques, a même réussi son entrée en Bourse, entrant ainsi dans “la cour des grandes” de la tech mondiale.

Mais, malgré son potentiel immense et ses promesses de croissance, le marché de la Femtech se heurte toujours à un paradoxe de taille. Alors qu’il s’adresse à la moitié de la population mondiale, il reste considéré comme un marché “de niche”. Des verrous culturels puissants, liés au caractère tabou des problématiques abordées. Les règles des femmes ne sont-elles pas encore représentées par un liquide bleu dans les publicités télévisées ? La ménopause reste un sujet ultra-sensible, et les entreprises spécialisées dans le bien-être sexuel sont parfois mises de côté, comme l’explique Marine Wetzel: “Faute de catégorie appropriée, ces entreprises sont parfois classées en “pornographie”, ce qui les exclut automatiquement de beaucoup d’opportunités auxquelles ont accès d’autres boîtes. Le financement, bien sûr, mais également le système de paiement, les outils de communication, voire la simple ouverture d’un compte en banque…”

La Femtech doit également faire face à une problématique plus structurelle : des milieux d’affaires, très masculins, qui ont parfois du mal à percevoir les enjeux du marché. Or, les fonds d’investissement français ne comptent que 14% de femmes associées, selon le baromètre SISTA/Boston Consulting Group (BCG). Un biais qui pénalise les créatrices de startups de la Femtech. Les freins au financement peuvent aussi s’expliquer par la jeunesse de ce secteur, selon Marine Wetzel : “Un investisseur base son analyse sur les exits* précédentes qu’il y a eu sur le marché. Le fait que ce secteur soit encore assez jeune fait qu’il y a moins de passif, ce qui ne va pas aider à rassurer les investisseurs”. Mais celle-ci garde des raisons d’espérer : “J’ai l’impression qu’il y a un intérêt croissant depuis quelque temps de la part des investisseurs.e.s. La question est aujourd’hui plutôt sur le taux de conversion entre l’intérêt porté et l’investissement réel. Peu sautent encore le pas.”

Plus globalement, c’est tout le secteur de la santé des femmes qui est confronté à une problématique de sous-investissement. Les dépenses en recherche et développement dans le secteur ne représentent que 4% des investissements dans le domaine de la santé. Une goutte d’eau en comparaison du cancer de la prostate qui représente, à lui seul, 2% du total des investissements. Pour faire sauter ces verrous, les entreprises Femtech doivent faire preuve d’ingéniosité, et “élargissent leur cible sur les familles pour contourner ce problème, comme Maven Clinic aux USA”, explique Marine Wetzel. Cette clinique virtuelle a élargi ses activités à l’ensemble de la famille après s’être initialement focalisée sur la santé des femmes : grossesse, fertilité, parentalité, etc. 

Des solutions dédiées à la santé des femmes 

Le marché de la Femtech fourmille pourtant de produits aux technologies révolutionnaires, permettant de sauver des vies et d’aider les femmes dans leur quotidien. Le marché de la “FemCare” ou des “Menstrutech”, une sous-branche de la Femtech, s’intéresse par exemple aux problématiques d’hygiène féminine, aux règles et aux fuites urinaires. Il représente, selon Frost & Sullivan, pas moins de 30 milliards de dollars, avec des sociétés comme NextGen Jane, qui propose des tampons intelligents capables de détecter l’endométriose, ou des applications rassemblant un ensemble de données (saignements, douleurs, humeur, sommeil, contraction…), afin de mieux connaître son cycle menstruel à l’aide des algorithmes. Autre branche de la Femtech : les solutions liées à la contraception, dont le marché représente aujourd’hui 18 milliards de dollars. La start-up suisse Ava, qui fabrique un bracelet de fertilité connecté, s’est récemment lancée à l’assaut du marché des contraceptifs.

La Femtech s’illustre également dans le domaine de la prévention contre les cancers féminins. Une start-up mexicaine, Higia Technologies, a développé un soutien-gorge accompagné de capteurs capable de détecter des changements de températures des seins de celle qui le portent, un possible signe de début de cancer du sein. La France n’est pas en reste, avec de très belles pépites portées par des femmes entrepreneuses qui brisent les tabous autour de la santé des femmes, à l’image d’Anne-Laure Courvoisier, fondatrice de la marque de culottes menstruelles Blooming. Dans cet esprit, le collectif France Femtech, qui souhaite fédérer toutes les actrices françaises du secteur, recense déjà plus de 70 initiatives hexagonales. Et ce n’est que le début ! 

*exits : de façon ironique, indique la fin plus ou moins brutale ou ridicule de quelque chose 

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